bien embarqué tout à l’heure avec le MP3, dans mon sac à dos, cet immense havresac
Quel fouillis, il faudra que je remette de l’ordre !
Enfin le voila, ça alors, il s’est déchargé, ce soir je ne pourrais le manipuler à ma guise !
Tous les jours de la semaine, ce trajet immuable tout comme un arnaqueur, m’escroque de trois heures de ma vie, piégées, rabotées, envolées.
Sans mes deux compagnons électroniques, qui ont le pouvoir de raccourcir cet intervalle, je deviendrai atrabilaire, renfrognée, taciturne tellement cela me mine. Ce long parcours obligé, avant, et après mon travail m’éloigne de mes pénates. Je stresserais davantage si je n’avais pas de quoi occuper mon esprit
Evidemment, je ne suis pas seule. Mais les autres, dans ce métro aux odeurs d’aisselles maltraitées, d’haleine empestées, aux contacts souvent déplaisants, ennuyeux, rarement sympathiques, sont tout comme moi, abrutis de fatigue, de soucis, de contrariétés et ne pensent qu’à une chose : s’enfermer d’avantage dans leur intérieur. Là où ils se sentent eux-mêmes.
Depuis que je fais ce trajet, j’ai appris à m’isoler... Ecouter les derniers MP3 sortis, surfer sur internet en 3 ou 4 G, envoyer des SMS, rire des blagues du chroniqueur à la mode sur Radio Truc.
Toutes ces menues activités comblent cette période de vacuité, et les heures s’écoulent…
Mais quand est-il de ce temps perdu de ma vie ?
Ces heures soustraites, « phagocytées » au détriment de celles où je pourrais vivre avec quiétude, ces moments volés, tout cela me rend telle une somnambule, ne sachant plus où ses pas la dirigent.
Ah ! Heureuse l’époque où jadis l’on se parlait facilement, s’enquérant sans malice des nouvelles de l’autre, l’indifférence ne régnait pas, où l’on donnait du temps au temps, les tensions alors s’évacuaient d’elles-mêmes.
Mais aujourd’hui, je suis là, nous sommes là, tous anonymes, sur ce quai de métro, quidams accrochés dans notre solitude, de vrais zombis, des ombres courant après leur ombre, pour arriver je ne sais où ? Où, plutôt, je le suppute, hélas, de l’autre coté de la barrière, où les métros sont des fantômes.
Mais trêve de réflexions amères, la rame arrive en sourdine, je monte, trouve une place, assise cette fois,
La vie est ainsi, elle tourne tout comme les roues pneumatiques du métro… sans cesse…..
JAK pour Bricabook 5 12 2013